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Mésolithique Téviec 2 (Docs préhistoire)

Sépultures mésolithiques de France et d’Europe,
Cahier IV - 2002/2003, Thème 6 - Cultes, rites et religions,

de Christian Verjux UMR ArScAn -
Ethnologie préhistorique et Service régional de l’archéologie, DRAC Centre

En quelques décennies, de nouvelles données ont permis une approche renouvelée des rites funéraires au Mésolithique en France comme en Europe. Dans cet article, nous présenterons d’abord un rapide bilan des connaissances sur les sépultures mésolithiques actuellement connues en France, en décrivant les principales caractéristiques des sites et des tombes. Ensuite, des éléments de comparaison seront examinés à partir des découvertes des autres pays d’Europe occidentale. En conclusion, nous tenterons de mettre en évidence les similitudes et les différences entre les sites, ainsi que les particularités des pratiques mésolithiques.
Cette présentation se fonde d’une part sur les synthèses déjà réalisées pour la France par H. Duday, J.G. Rozoy, F. May et, d’autre part, pour les autres pays européens sur les informations disponibles, en privilégiant les données récentes (Duday 1976 ; Rozoy 1978 ; May 1986 ; Newell et al. 1979). Sur le plan chronologique, seules les sépultures attribuées classiquement au Mésolithique ont été retenues, c’est-à-dire entre environ 10 000 et 5 000 ans avant J.-C., même si des différences sensibles existent entre l’ouest, le sud et le nord de l’Europe, notamment en regard des processus de néolithisation.

Les sépultures mésolithiques en France : un bilan des connaissances

À ce jour (2003) sous réserve de découvertes inédites et du réexamen de l'attribution de certaines sépultures, 26 sites ont livré des sépultures mésolithiques en France

Fig 1 Carte des sépultures mésolithiques en France

Neuf d’entre eux seulement étaient connus avant les années quarante, dont les deux importants cimetières de Téviec (Saint-Pierre Quiberon) et Hoëdic dans le Morbihan. La découverte d'une dizaine de sites nouveaux est le fait marquant de ces vingt dernières années (soit le tiers du nombre connu auparavant). Ainsi, les gisements de plein air au nord de la Loire ont livré une dizaine de sépultures. Une grande variabilité dans les pratiques funéraires est également apparue ou a été confirmée (sépulture primaire, incinération, manipulation de corps…). Par ailleurs, le recours plus systématique aux datations radiocarbones a confirmé, par exemple, l'ancienneté de la nécropole de La Vergne (Charente-Maritime), ainsi que la longue durée d'utilisation ou les usages répétés de certains lieux.
Les descriptions qui suivent reprennent les éléments significatifs des sites, classés par grands thèmes : aménagements des tombes — inhumations, incinérations, manipulations — feu-ocre, mobilier, parure — dépôts animaux — sépultures simples, multiples, collectives — la notion de cimetière.

Fig. 2. Tableau des caractéristiques principales des sites funéraires mésolithiques découverts en France. (l’année de découverte est indiquée à gauche du tableau)


Aménagements des tombes
Pour les fouilles anciennes, les informations relatives à l’aménagement des tombes sont souvent partielles (May 1986), voire peu fiables. À Montardit (Ariège), des galets, dont certains peints, avaient été placés autour du corps. Des grosses pierres et des galets peints à Montclus (Gard), des pierres disposées sur les genoux à Culoz (Ain) tandis qu’au Peillon (Alpes-Maritimes), le squelette était recouvert de quatre dalles et à Istres (Bouches-du-Rhône) un caisson de pierres avait été aménagé. À Auneau (Eure-et-Loir), une sépulture du Mésolithique final avait été déposée sur un dallage (Verjux 1999).
Les massifs de pierres, « cairns » ou « mausolées » qui recouvrent 6 des 10 tombes de Téviec (Péquart et al. 1937) sont sans nul doute les structures les plus connues pour le Mésolithique final. Cependant, il conviendrait de revoir ces aménagements et leur évolution lors des processus taphonomiques, afin de s’assurer qu’il s’agissait de dispositifs visibles, constituant de véritables monuments. Ainsi, dans le cas de la sépulture d'Auneau, datée du Mésolithique moyen (Verjux, Dubois 1997), qui présente des similitudes étroites avec la sépulture M de Téviec, les pierres avaient été placées sur les membres inférieurs et ont donc très peu bougé lors de la disparition des parties molles du corps

Fig. 3. La sépulture du Mésolithique moyen en position assise d’Auneau (Eure-et-Loir) (Photo, relevés et dessin C. Verjux)

Elles étaient donc comprises dans le volume initial du creusement de la tombe et ne pouvaient constituer ni un mausolée, ni même un dispositif de signalisation.
Des bois de cerf se rencontrent fréquemment à Téviec et Hoëdic où ils peuvent participer à l’architecture de la tombe. À Téviec (Péquart et al. 1937), la sépulture A, contenant deux individus, présentait un entourage de pierres plates et des ramures de cerf autour des corps. Dans la tombe D, les bois encadraient le squelette, tandis qu’ils encadraient le corps et supportaient la tête dans la tombe H. À Hoëdic (Péquart, Péquart 1954), des ramures de cerf supportaient la tête du défunt dans la tombe H et elles constituaient un véritable dispositif ornemental dans la tombe J, alors que dans la tombe K sur les 6 bois de cervidés présents, trois étaient des outils et dans la tombe L, un bois de cerf était simplement posé sur la poitrine du défunt.
Ces « sépultures sous bois de cerf » doivent donc être considérées avec une certaine réserve, puisque les ramures ne semblent constituer parfois que des dépôts mobiliers, et que par ailleurs, rares sont les autres sites qui ont livré en France de telles structures

Fig. 4. Comparaisons des caractéristiques des sites funéraires mésolithiques
découverts en France avant 1980 (en blanc) et après 1980 (en noir)

Récemment, la tombe complexe de Val-de-Reuil (Eure) a révélé une structure faite de crânes de cerf, de chevreuil et de bovidé, aménagée au-dessus des inhumations (Billard et al. 2001). Il est possible également que deux tombes de La Vergne aient eu une architecture aérienne. Dans la structure 7, deux bois de cerf se situaient bien au-dessus du fond de la fosse tandis que deux volumineux massacres d’aurochs occupaient la moitié sud de la structure 10 (Duday, Courtaud 1998).

Inhumations, incinérations, manipulations
Une grande variété peut être observée dans la position des défunts inhumés. Ils ont été allongés sur le dos, en décubitus complet ou partiel, placés en position repliée sur le dos ou encore en position accroupie ou assise. Cette dernière position est assez répandue, en particulier dans les deux cimetières armoricains de la fin de la période. Sur les 15 sujets de Téviec dont la position est connue, 6 étaient en position assise ou accroupie, membres inférieurs repliés, dans les sépultures A (2 individus), D, E, J et M. Dans 5 autres cas, le défunt avait les épaules et la tête surélevées, dans les tombes B et H ainsi que 3 des 6 individus inhumés en K (Péquart et al. 1937). À Hoëdic, sur les 11 sujets dont la position est connue, un seul défunt (sépulture H) était enterré assis, les autres étant soit allongés, soit repliés sur un côté (Péquart, Péquart 1954). La position assise est également attestée à Saint-Agnan en Vercors (Drôme), dans la grotte Joëlle, peut-être à Sous-Sac (Ain), à Auneau (Eure-et-Loir), à Rueil-Malmaison (Hauts-de-Seine), à Villeneuve-la-Guyard (Yonne), ainsi que dans deux tombes de La Vergne (Duday, Courtaud 1998 ; Verjux, Dubois 1997).
Les crémations ou incinérations sont plutôt difficiles à identifier avec certitude pour les fouilles anciennes (May 1986). À Cuzoul-de-Gramat (Lot), les restes de 3 ou 4 individus incinérés auraient été découverts. La deuxième sépulture de Rochereil (Dordogne) serait une incinération, contenant peut-être les restes de deux enfants. Cependant, la plupart des fouilles récentes ont révélé la présence d’incinérations, attestant cette pratique de manière indiscutable dès le Mésolithique moyen (Fig. 4). À La Chaussée-Tirancourt (Somme), une fosse de 1,5 par 1 m contenait les restes incinérés d’au moins 2 adultes et un enfant, représentant environ 1,5 kg d’ossements ayant subi une combustion assez poussée (Ducrocq, Ketterer 1995). À La Vergne, la structure 7 contient les ossements calcinés d’un adulte déposés à côté des inhumations (Duday, Courtaud 1998). Les vestiges plus discrets d’une incinération ont été mis au jour à Ruffey-sur-Seille (Jura). Une petite fosse de 13 cm de diamètre contenait 87 g d’os. De même, à Rueil-Malmaison, des restes humains calcinés (environ 200 g) associés à des pierres chauffées pourraient également se rapporter à une incinération (Le Goff 2002).
Des manipulations des corps ont été décrites ou supposées pour une dizaine de sites (Fig. 4). Cependant, il s’agit, dans la majorité des cas, de découvertes anciennes (May 1986 ; Rozoy 1978). Par ailleurs, il convient de distinguer les déplacements d’ossements résultant d’inhumations successives des réelles manipulations des corps eux-mêmes. Dans l’abri de Sous-Sac, la mandibule recueillie parmi les restes humains isolés (« sépulture » C) présentait des traces de décarnisation et de combustion. La deuxième sépulture de Montardit, comme la deuxième sépulture de Culoz pourraient être des sépultures secondaires, tandis qu’à Cuzoul-de-Gramat, les restes humains incinérés porteraient des traces de décarnisation. À Saint-Rabier (Dordogne), le corps aurait été décharné avant enterrement. La discussion reste ouverte pour le crâne isolé de l’abri de Mannlefelsen I à Oberlarg (Haut-Rhin) ou encore les restes humains portant des traces de découpe de Noyen-sur-Seine en Seine-et-Marne et de la grotte des Perrats à Agris en Charente (Cauwe 1998).
À La Vergne, une fosse recoupant la structure 3 renfermait les restes d’un adulte âgé, et pourrait également correspondre à un dépôt secondaire ou à une réduction de corps (Duday, Courtaud 1998). Le seul cas attesté sans discussion et décrit avec précision concerne la sépulture de La Chaussée-Tirancourt (fosse 4) qui renfermait le squelette presque complet d’un homme adulte. Les os longs (tibias, fémurs, humérus) avaient été rangés parallèlement de part et d’autre du crâne. Les os de petites dimensions étaient absents (Ducrocq et al. 1996).

Feu
Le rituel associant le feu à la mort est considéré comme fréquent au Mésolithique (Fig. 4). Il a été largement décrit pour les sites de Téviec et Hoëdic avec la mise en évidence de « foyers rituels » au-dessus des inhumations (Duday, 1976 ; May 1986 ; Péquart, Péquart 1954 ; Péquart et al. 1937). À Montardit, Tursac (Dordogne) et au Cheix (Puy-de-Dôme), les squelettes reposaient sur un foyer, sans que l’on puisse affirmer que les structures étaient réellement en relation. À Rochereil, le squelette était entouré d’une couche de cendres. Des traces de feu étaient également présentes au-dessus de la sépulture de Bonifacio (Corse). À Auneau, des terres provenant de vidange de foyers participaient au comblement de la fosse sépulcrale (Verjux, Dubois 1997), alors qu’à Val de Reuil, les crânes, bois et ossements animaux ont été brûlés au-dessus des inhumés, lors d’une phase finale de condamnation de la tombe (Billard et al. 2001).

Ocre, mobilier, parure
À Téviec et Hoëdic, l’ocre est présente dans toutes les tombes (Péquart, Péquart 1954 ; Péquart et al. 1937), phénomène déjà fréquemment observé dans les sépultures du Paléolithique supérieur. L’ocre ou d’autres colorants similaires ont également été signalés anciennement sur un grand nombre de sites (May 1986) comme à Montardit, Serrières-sous-Ain (Ain), Rochereil, Le Cheix (crâne ocré), Culoz, Saint Rabier. À Bonifacio, le corps était entièrement recouvert d’un colorant brun rouge. Pour les fouilles récentes, l’ocre se rencontre plus rarement (Fig. 4). Elle est présente dans toutes les sépultures de La Vergne (Duday, Courtaud 1998) et l’incinération de Ruffey-sur-Seille était accompagnée seulement d’une petite boulette d’ocre (Le Goff 2002). Un examen attentif montre finalement que la présence d’ocre est attestée dans moins de la moitié des sépultures attribuées au Mésolithique à ce jour en France (Fig. 4).
Le mobilier est représenté de façon très variable dans les tombes mésolithiques françaises. Il est même totalement absent d’une dizaine de sites (Fig. 4). Il est par ailleurs parfois délicat d’attribuer avec certitude le mobilier découvert près d’un défunt sans données précises sur le contexte ou la stratigraphie (May 1986). Dans la première sépulture de Montardit, 18 galets, dont 1 peint, étaient autour du corps, accompagnés d’un mobilier abondant, dont un outil sur une défense de sanglier. Au Cheix, une défense de sanglier, un pendentif et plusieurs outils en silex étaient autour du squelette. Certaines tombes étaient particulièrement riches à Téviec, comme la sépulture M avec des armatures, 14 lames et des éclats et le sixième inhumé de la tombe K accompagné de lames retouchées en silex et de plusieurs outils en schiste, bois de cerf et os (Péquart et al. 1937). Des outils sur bois de cerf se rencontrent dans 4 tombes de Hoëdic (Péquart, Péquart 1954). De nombreux outils en silex se trouvaient dans la sépulture 7 de La Vergne (Duday, Courtaud 1998).
La parure est abondante dans les tombes de Téviec et Hoëdic. Dans les sépultures masculines, Trivia europea domine, alors que dans les tombes féminines, Littorina obtusata est omniprésente. Les parures sont les plus nombreuses dans les tombes de jeunes adultes et rares dans les sépultures d’enfants. Enfin, les inhumations avec plusieurs individus sont généralement les plus riches en parures (Taborin 1975). Des coquillages accompagnaient également les sépultures de Cuzoul, Culoz, avec des dents perforées, et de Peillon, avec un disque percé en os (May 1986). L’abondance des parures, dans toutes les tombes les mieux conservées, est aussi l’une des caractéristiques de La Vergne (Duday, Courtaud 1998), comme dans les nécropoles armoricaines.

Dépôts animaux
En plus des ramures de cervidés, des dépôts de mandibules de sanglier ou de cerf se rencontrent dans les foyers rituels surmontant certaines tombes de Téviec et ont été interprétés comme des offrandes en raison de leur relation directe avec les inhumations (Péquart et al. 1937). À Auneau, deux fosses renfermaient un crâne d'aurochs, accompagné dans un cas de deux armatures de flèches. Dans une troisième, un bois de cerf de 70 cm de longueur avait été déposé sur un crâne d'aurochs. Les datations par le radiocarbone de deux crânes montrent que ces dépôts sont antérieurs de quelques siècles à la sépulture la plus ancienne connue sur le site, datée du début du Mésolithique moyen (Verjux 1999). Dans deux fosses de La Chaussée-Tirancourt, des mandibules de cerf, d'aurochs et de sanglier pour l'une, un crâne de sanglier et un biseau en bois de cerf pour l'autre, pourraient également correspondre à des offrandes funéraires, déposées à proximité des sépultures (Ducrocq, Ketterer 1995). À La Vergne, deux massacres d'aurochs avaient été déposés dans la sépulture 10 et deux bois de cerf dans la sépulture 7. Dans les deux cas, ces éléments devaient participer à l’architecture de la tombe (Duday, Courtaud 1998). À Val-de-Reuil, le dépôt de restes animaux, détruit ensuite par le feu, était dominé par les fragments de bois de cerf, mais comprenait également du chevreuil, un grand bovidé et un suidé (Billard et al. 2001).
Il peut donc s’agir dans certains cas de dépôts à l’intérieur des tombes, au-dessus des défunts ou encore de structures indépendantes. On peut alors s’interroger sur d’éventuels cultes ou rituels particuliers mettant en œuvre certains animaux.

Sépultures simples, multiples, collectives.
Une proportion importante des tombes mésolithiques en France compte plus d’un individu, phénomène renforcé par les données des fouilles récentes (Fig. 4). Des sépultures doubles sont connues, mais également triples, voire davantage. Ainsi à Téviec, les dix tombes ont livré un total de 23 corps (Péquart et al. 1937) alors qu’à Hoëdic, les neuf tombes contenaient 14 corps (Péquart, Péquart 1954). Les sépultures doubles associent souvent un adulte et un enfant. À Téviec, deux sépultures contenaient 3 défunts (C et H) et 6 dans un cas (K), tandis qu’à Hoëdic, la tombe C renfermait 4 corps. Des sépultures multiples se rencontrent également dans certaines incinérations, peut-être à Cuzoul et Rochereil (May 1986), mais aussi à La Chaussée Tirancourt avec au moins deux adultes et un enfant (Ducrocq, Ketterer 1995). À La Vergne, les quatre tombes connues contiennent au total les restes de 11 individus. La tombe la plus complexe (Sépulture 7) renfermait quatre défunts, avec deux adultes placés l’un contre l’autre, les restes d’un fœtus et un quatrième individu incinéré (Duday, Courtaud 1998).
Dans quelques cas, il a pu être démontré que les défunts avaient été introduits successivement dans la tombe, ce qui fait remonter le phénomène des sépultures collectives au moins au Mésolithique. C’est le cas pour la sépulture K de Téviec (Péquart et al. 1937). De même à Val de Reuil, trois individus ont été enterrés lors de deux phases successives, avec le rangement des os des deux premiers défunts avant le dépôt d’un troisième (Billard et al. 2001).

La notion de cimetière
La découverte de plusieurs sépultures en un même lieu ne signifie pas pour autant une contemporanéité des enterrements, voire l’utilisation par les mêmes groupes humains de ce lieu. La réutilisation d’un site peut être liée à des facteurs topographiques, de points remarquables du paysage, situation de nombreux abris-sous-roche ou grottes, qui ont parfois connu des occupations au Paléolithique, voire, après le Mésolithique, au cours du Néolithique, puis de la Protohistoire. Deux tombes mésolithiques ont ainsi été découvertes dans les sites de Montardit, Rochereil, Montclus et Culoz. À Istres, plusieurs sépultures avaient été détruites anciennement (May 1986). Deux phases différentes de sépultures sont connues à La Chaussée-Tirancourt, espacées de quelques siècles (Ducrocq, Ketterer 1995), tandis qu’à Auneau, une tombe du Mésolithique moyen et deux autres de la fin du Mésolithique ont été fouillées (Verjux 1999).
Trois véritables nécropoles sont connues en France. À Téviec, les 10 tombes sont groupées sur une quarantaine de mètres carrés, une seule d'entre elles étant un peu à l'écart, mais à quelques mètres seulement des autres (Péquart et al. 1937). À Hoëdic, mis à part les deux premières sépultures, les 7 autres sont également très proches les unes des autres et réparties sur quelques dizaines de mètres carrés (Péquart, Péquart 1954). Bien qu'une destruction partielle des deux sites soit probable et que leur extension ne soit pas connue avec certitude, cette forte densité est peut-être une particularité des nécropoles bretonnes si l’on compare avec les autres cimetières contemporains de l’Ouest de l’Europe. Les récentes datations obtenues par AMS ont montré un étalement des enterrements sur un millénaire dans les deux cas. Par ailleurs, sur les dix dates obtenues, à Téviec, comme à Hoëdic, une tombe plus ancienne semble marquer l’origine de la nécropole, tandis qu’une sépulture plus récente pourrait indiquer la fin de l’utilisation des sites, à une période correspondant au début du Néolithique moyen (Schulting 1999). À La Vergne, les quatre tombes se trouvaient sur une surface de quelques dizaines de mètres carrés, mais les limites de la nécropole ne sont pas connues dans la mesure où deux sépultures se situaient en limite de l’emprise des travaux routiers. La remarquable homogénéité des trois datations radiocarbones indique une stricte contemporanéité des tombes, entre 8 300 et 8 000 av. J.-C. Cependant, les restes mal conservés de deux autres sépultures pourraient attester d’une utilisation plus récente du site (Duday, Courtaud 1998).
Il faut donc imaginer que ces sites pouvaient, pour diverses raisons, être fréquentés par des populations successives au cours du Mésolithique. Il n'est pas impossible que le caractère funéraire (ou sacré) de certains lieux ait été parfois prépondérant, même si le plus souvent les cimetières sont systématiquement décrits comme étant associés étroitement à des habitats.

Les sépultures mésolithiques en Europe : quelques éléments de comparaison
Dans le cadre de cet article, il convient, sans viser à l’exhaustivité, de donner quelques éléments de comparaison, pour élargir le champ de la réflexion sur les pratiques funéraires à l’ensemble de l’Europe occidentale. Ces comparaisons doivent cependant être considérées avec prudence, d’une part en raison de l’espace géographique couvert, et, d’autre part, en fonction des données chronologiques, les sites étudiés s’étalant sur plus de 5 millénaires. Par ailleurs, la qualité de l’information et le nombre de sites sont extrêmement variables. Ainsi, en comparaison avec la France, plus de 30 sites sont actuellement connus pour le seul Danemark, pour une superficie de seulement 43 000 km2. De même, dans certaines nécropoles, le nombre de tombes peut atteindre plusieurs dizaines, voire dépasser la centaine, ce qui est sans commune mesure avec les petits cimetières français.

Aménagements des tombes
Des bois de cerf participent à l’architecture de plusieurs tombes des nécropoles scandinaves. À Skateholm I (Scanie, Suède), des bois de cerfs se situaient dans la partie supérieure de la sépulture 14, tandis qu’à Skateholm II, un assemblage de bois de cerf avaient été disposés au niveau des membres inférieurs du défunt dans la tombe XI et dans la tombe XV un bois de cerf avait été placé devant les pieds de l’inhumé et deux autres au-dessus de sa tête (Larsson 1990 a et 1990 b). À Bøgebakken (Vedbaek, Zealand, Danemark), des andouillers de cerf se trouvaient sous les épaules de l’inhumé de la tombe 10, alors que des blocs de pierre se situaient au niveau des membres inférieurs. Dans la tombe 22, les ramures de cerf étaient sous la tête et le bassin (Albrethsen, Brinch Petersen 1977). Des aménagements en matière périssable, placés sous les corps, à l’image de certaines ramures de cervidés, ont également été mis en évidence pour la tombe IX de Skateholm II et pour la sépulture 8 du cimetière de Bøgebakken (Nillson Stutz 2003). Au Portugal, des outils en bois de cerf se rencontrent dans certaines sépultures, mais il n’existe pas de réelles constructions (Morais Arnaud 1990 ; Roche 1972).
Enfin, il convient de signaler l’existence de superstructures en bois. Quatre poteaux encadraient la fosse de la sépulture 26 à Skateholm I, trace probable d’une construction en bois au dessus de la tombe. Une structure identique a pu exister autour de la sépulture IV de Skateholm II (Larsson 1990 b).

Inhumations, incinérations, manipulations
La position des défunts inhumés est variable, y compris parfois au sein d’une même nécropole, sans véritable ligne directrice. Au Portugal, le décubitus dorsal est prépondérant dans la vallée de Muge (Roche 1972) alors que dans les nécropoles de la vallée du Sado la position repliée sur le côté, parfois très contractée, domine (Morais Arnaud 1990). À Skateholm, en Suède, les deux cimetières de la fin du Mésolithique ont livré respectivement 62 tombes pour l'un et une vingtaine pour l'autre. À Skateholm I, sur les 46 tombes fouillées en 1984, 36 % des individus étaient allongés sur le dos, contre 41 % en position repliée sur un côté et 20 % en position assise, le tronc pouvant être parfaitement vertical ou simplement relevé. Un individu, dans la tombe 33, avait été enterré en procubitus (Larsson 1990 b). La position repliée sur le côté est absente du cimetière de Skateholm II où quelques individus sont inhumés en position assise, notamment dans les tombes VIII, X, XV et XXII. D’autres inhumations en position assise sont connues en Suède (Newell et al. 1979). À Uleberg (Västa Gotaland), une tombe bordée de pierres a livré deux individus enterrés vraisemblablement en position assise et recouverts d'une douzaine de pierres. Un sujet en position également assise, membres inférieurs repliés, a été découvert à Bäckaskog (Scanie). Enfin, à Stora Bjers (Gotland), un défunt avait été enterré en position accroupie et accompagné de bois de cerf. Au moins deux autres sépultures avec défunt assis auraient également été découvertes à Kams (Gotland) et pourraient se rapporter à l'Ertebøllien (Verjux, Dubois 1997). À côté de ces sites, les nombreuses fouilles de sépultures mésolithiques au Danemark, pourtant très proches à la fois sur le plan chronologique et sur le plan géographique pour certaines, n’ont pas révélé de tombes de ce type. Dans les autres pays européens, cette position paraît plus rare, en l’état actuel des connaissances. L’un des défunts de Hardinxveld (Hollande méridionale) était également enterré en position assise (Louwe Koojmans 2001 b). En Allemagne, au moins deux sites ont livré des inhumés en position assise, à Rhotenklempenow (Mecklembourg) et à Bottendorf en Hesse (Jeunesse 1998). En Belgique, un défunt vraisemblablement enterré assis a également été découvert dans la sépulture collective regroupant au moins trois individus dans l'Abri des Autours à Dinant (Cauwe 1998).
Le rite de l’incinération, longtemps considéré comme anecdotique, est finalement relativement répandu. Dans l’abri sous roche de Vionnaz (Suisse), des ossements humains incinérés, correspondant aux restes d’un adulte, avaient été déposés dans une petite cuvette (Crotti 1993). Aux Pays-Bas, deux sites ont livré de tels témoins. À Oirshot V (Brabant septentrional), les restes d’un enfant (moins de 90 g) ont été découverts au milieu de cendres et d’une abondante industrie lithique. Les ossements d’un adulte et d’un enfant se trouvaient mélangés avec des restes animaux brûlés à Dalfsen en Frise (Le Goff 2002 ; Newell et al. 1979). Parmi les défunts de l’Abri des Autours à Dinant, un adulte a été incinéré (Cauwe 1998). Des restes humains incinérés ont également été identifiés récemment sur le site de Loschbour, à l’occasion de la nouvelle présentation des collections du Musée du Grand-Duché du Luxembourg (F. Le Brun-Ricalens, comm. pers.). En Scandinavie, les derniers travaux ont montré que le rite de l’incinération pourrait couvrir tout le Mésolithique et non pas seulement la fin de la période. En effet, les découvertes de Tågerup (Scanie) et de Stora Förvar (Gotland) en Suède se rapportent au Kongemosien, tandis celles de Gøngehusvej 7 et de Vedbaek Bolbaner (Zealand) correspondent aux phases maglemosienne et ertebollienne (Ahlström 2003 ; Brinch Petersen, Meikeljohn 2003). À Skateholm I, la tombe 11 correspond aux restes incinérés d’un adulte, recueillis sur une surface de 10 m2, accompagnés de fragments d’ossements animaux également brûlés. Un deuxième cas d’incinération pourrait être représenté par la tombe 20 (Perrson Persson 1984). Les incinérations n’ont pas été mentionnées à ce jour dans la partie méridionale de l’Europe (Italie, Espagne, Portugal).
Comme en France, les données relatives à d’éventuelles manipulations des corps sont souvent lacunaires et délicates à prouver. La grotte de Grosse Ofnet (Bavière, Allemagne) a livré deux « sépultures collectives » originales contenant respectivement 6 et 27 crânes humains, accompagnés de nombreux objets de parure, mais la validation des informations recueillies est limitée par l’ancienneté de la découverte (May 1986). En Belgique, N. Cauwe a mis en évidence des manipulations de corps dans les sépultures collectives en grottes (Cauwe 1998). À l’Abri des Autours à Dinant, les treize corps ont subi des prélèvements avant d’être déposés dans le fond de la cavité. Dans la grotte Margaux, les ossements correspondant à une dizaine de corps ont été apportés à plusieurs reprises dans la cavité, déjà décharnés et placés dans une simple fosse et sur un dallage adjacent. Des cas avérés de manipulations de corps ont été confirmés par les études récentes de L. Nilsson (Nillson Stutz 2003). Dans la nécropole de Skateholm I, le sujet de la sépulture 13, désarticulé et incomplet (Perrson Persson 1984), a subi un traitement particulier avant son dépôt dans la tombe. La tombe 28, sépulture primaire en milieu colmaté, a été réouverte pour permettre le prélèvement de certains os du côté gauche du défunt, déposé en décubitus dorsal. Les nombreux restes humains plus ou moins isolés découverts sur les deux sites de Hardinxveld pourraient aussi correspondre à un traitement différent de certains corps, à côté des inhumations (Louwe Koojmans 2001 a et b).
Feu
Les pratiques faisant intervenir le feu sont également mentionnées sur certains sites européens. À Birsmatten, en Suisse (Crotti 1993), un foyer se situait à un mètre de la sépulture et le sol autour de la tombe était brûlé. Au Portugal, à Moita do Sebastiõ, un léger feu a été allumé dans trois cas autour du corps (Roche 1972). En Suède, à SkateholmI, la superstructure en bois au-dessus de la tombe 26 a brûlé et une couche de crémation contenant des ossements humains a été rencontrée au-dessus de la tombe 11 (Larsson 1990 b).

Ocre, mobilier, parure
Dans le cadre de sa thèse, J. Grünberg a analysé les données relatives à 125 sites funéraires répartis dans 23 pays européens. Le résumé de ce travail, à l’occasion du colloque « Nature et Culture » (Grünberg 1995), montre toute la complexité, notamment dans ce domaine, à vouloir élaborer des hypothèses valides à partir de sites répartis sur l’ensemble de l’Europe et pour une tranche chronologique de plus de cinq millénaires. Cependant des différenciations semblent apparaître en fonction de l’âge, du sexe et peut-être du statut social des défunts. Ces données indiquent aussi de grandes variations régionales et l’interprétation est toujours limitée par la qualité de l’information recueillie. Ainsi, à Moita do Sebastião, par exemple, un tiers des tombes seulement renfermait du mobilier d’accompagnement (Roche 1972). La situation était différente dans les cimetières de Téviec et Hoëdic, mais le nombre de défunts est trop faible pour en tirer des conclusions.
Dépôts animaux
Les dépôts de restes fauniques sont signalés dans plusieurs sites européens. En Allemagne (Jeunesse 1998), des ossements animaux pouvant être considérés comme des offrandes alimentaires ont été découverts à Bad Dürremberg (Saxe). La tombe de Schöpsdorf 14 (Saxe) contenait des ossements calcinés de suidés dans la partie sommitale du comblement de la fosse sépulcrale, peut-être issus d’un processus comme celui décrit à Val-de-Reuil. Deux côtes d'aurochs reposaient à côté du défunt dans la sépulture de Loschbour, dans le Grand Duché de Luxembourg (Newell et al. 1979). À Skateholm, une fosse ne contenait que trois andouillers de cerf (Larsson 1990 b). De même, à Bøgebakken, la tombe 11 ne renfermait qu’un andouiller de cerf, une alêne en os et une hache. Il est possible que le défunt ait été retiré peu de temps après l’enterrement (Albrethsen, Brinch Petersen 1977), mais il pourrait également s’agir d’un mode de dépôt particulier.
La présence de tombes de canidés semble être une particularité du nord de l’Europe, bien que ce phénomène soit connu ailleurs dans le monde (Larsson 1990 a). Dans certains cas, ils ont été placés dans les sépultures humaines comme dans les tombes 33, 46 et 62 de Skateholm I ou X, XIII et XVI de Skateholm II, mais dans de nombreux autres exemples il s’agit de véritables sépultures, dans une dizaine de cas au total, avec parfois des dépôts accompagnant le chien inhumé, notamment un andouiller de cerf, trois lames de silex et un percuteur sur andouiller décoré dans la tombe XXI. Des tombes similaires se rencontrent également au Danemark, par exemple à Gøngehusvej 7 (Nielsen, Brinch Petersen 1993), et les fouilles récentes de Hardinxveld aux Pays Bas ont permis de découvrir trois nouvelles sépultures de chiens, avec un squelette complet en connexion dans un cas, les deux autres étant moins bien conservés (Louwe Koojmans 2001 a).
Sépultures simples, multiples, collectives
Des sépultures doubles sont connues dans les grands cimetières scandinaves, mais elles sont relativement rares. Il peut s’agir d’un enfant accompagnant un adulte ou de deux adultes. À Bøgebakken, seuls trois des dix-huit tombes contenaient plus d’un défunt (Albrethsen, Brinch Petersen 1977), tandis que dans les deux cimetières de Skateholm, seules les tombes 14 et X présentent l’association de deux défunts dans la même fosse sépulcrale (Larsson 1990 b). Une tombe isolée découverte à Stroby Egede (Zealand) au Danemark (Brinch Petersen 1988) contenait les corps de huit individus enterrés simultanément : une femme âgée, un homme adulte et une jeune femme accompagnant cinq enfants, dont trois en bas âge

Fig. 5. La sépulture mésolithique multiple de Stroby Egede (Danemark)
ayant livré 8 défunts (d’après Brinch Petersen 1988)

N. Cauwe a recensé une dizaine de sépultures collectives dans le Mésolithique ancien de Belgique et d’Angleterre, mais en raison de fouilles souvent anciennes, seuls la grotte Margaux et l’Abri de Autours sont vraiment convaincants (Cauwe 1998). À l’Abri de Autours, la dispersion des corps dans deux petites fosses, le long de la paroi, dans une fissure et avec des traitements différents confirme la succession des gestes funéraires. Dans la Grotte Margaux, les datations par le radiocarbone attestent des apports successifs des restes humains, pendant plusieurs siècles. Une sorte de cairn aurait ensuite été aménagée pour condamner la tombe.
La notion de cimetière
Des sites regroupant quelques tombes sont connus en Allemagne, à Bottendorf (Hesse) et à Schöpsdorf 2 en Saxe (Jeunesse 1998). Les deux fouilles récentes de Hardinxveld ont également livré plusieurs tombes, associant sépultures primaires et secondaires (Louwe Koojmans 2001 a et b).
En Suède et au Danemark, les cimetières sont assez étendus. Skateholm I a livré une soixantaine de tombes sur 2000 m2, assez dispersées, avec seulement quelques petits groupes de sépultures, les 22 tombes de Skateholm II sont réparties sur près de 500 m2, la moitié d'entre elles étant cependant regroupées dans un espace d'une centaine de m2 (Larsson 1990 b). À Bøgebakken, la vingtaine de sépultures s'étendait sur plus de 1500 m2, une partie du site ayant de plus été détruite (Albrethsen, Brinch Petersen 1977). À Moita do Sebastião, au Portugal, la plupart des tombes d'adultes sont situées sur une surface d’environ 75 m2 (Roche 1972) alors que dans la vallée du Sado (Morais Arnaud 1990), certains cimetières présentent une densité relativement élevée de tombes (22 pour seulement 54 m2 fouillés à Romeiras) mais d'autres plus moyenne (27 seulement pour 635 m2 fouillés à Cabeço do Pez).
La plupart des cimetières semblent avoir fonctionné pendant une certaine durée. Au Portugal, dans la vallée du Sado, les Mésolithiques ont enterré leurs défunts au rythme de leurs déplacements saisonniers, vraisemblablement pendant plusieurs siècles. Il pourrait en avoir été de même à Moita do Sebastião dans la vallée de Muge, où certaines tombes se chevauchent parfois indiquant une chronologie relative des inhumations. Quelques recoupements de tombes ont également été observés à Skateholm I et indiquent une perduration des inhumations au cours des temps. A Bøgebakken, les datations par le radiocarbone révèlent de même un étalement des enterrements tandis que à Gøngehusvej 7, également à Vedbæk, deux niveaux de sépultures sont nettement distincts, de plusieurs siècles (Nielsen, Brinch Petersen 1993). À Tågerup, les six tombes correspondent à deux phases différentes, espacées de plus d’un millénaire, trois d’entre elles appartenant au Kongemosien et les trois autres à l’Ertebollien (Ahlström 2003).
En guise de conclusion
Malgré les limites inhérentes à la documentation disponible, avec moins d’une trentaine de sites funéraires pour la France entière, une part importante de découvertes anciennes et une durée de plus de cinq millénaires, ce rapide bilan des connaissances montre une grande diversité dans les pratiques funéraires au Mésolithique. Cette constatation est corroborée par les données des pays européens voisins, mais des traits communs peuvent être dégagés.
L’une des différences essentielles avec le Paléolithique est l’existence de véritables cimetières, dès les phases anciennes du Mésolithique .

Fig. 6. Carte des sites mésolithiques européens avec plusieurs tombes
ou des cimetières. (note : seuls les sites mentionnés dans
le texte sont représentés sur les cartes des figures 6 à 9)

Ces nécropoles connaissent souvent une utilisation sur une longue durée, phénomène pouvant être mis en relation avec le statut particulier de ces sites, en tant que lieux sacrés, ou, sans que cela soit contradictoire, avec un changement dans les modes de vie, marqué par une diminution de la mobilité des groupes humains.
Par rapport au Néolithique, les similitudes sont beaucoup plus marquées. Au Mésolithique, tous les types de sépultures sont déjà présents, que ce soit en grotte ou dans les sites de plein air. Des inhumations primaires et secondaires sont connues, avec une proportion importante et presque unique d’inhumations en position assise .

Fig. 7. Carte des sites mésolithiques européens
comportant des inhumations en position assise

Le rite de l’incinération est relativement répandu, dans une grande partie de l’Europe.

Fig. 8. Carte des sites mésolithiques européens comportant des incinérations

Des tombes regroupant plusieurs individus se rencontrent assez fréquemment, que ce soit des sépultures doubles ou multiples, et, plus rarement, de véritables sépultures collectives. Certaines sépultures présentent des aménagements importants

Fig. 9. Carte des sites mésolithiques européens comportant des tombes aménagées

avec des blocs de pierres, des ramures de cervidés, surtout à l’extrême fin du Mésolithique, parfois des crânes d’aurochs, mais vouloir y rechercher une filiation avec les architectures monumentales néolithiques peut sembler excessif.
Les rites funéraires mésolithiques pourraient ainsi témoigner des changements structurels dans la société annonçant ou préparant le mode de vie néolithique. Cependant il est difficile d’aller plus loin quant à la mise en évidence d’éventuelles hiérarchies sociales ou pour affiner l’image que les pratiques funéraires donnent de ces sociétés, les rites liés à la mort ne pouvant être étudiés en tant que tels, sans être replacés dans le contexte global des dernières populations de chasseurs-collecteurs, de l’étude des sites d’habitat, ainsi que leur insertion dans l’environnement. De même, il est indispensable de préciser le cadre culturel et chronologique, en particulier en prenant en compte les phénomènes liés à la néolithisation.
La découverte de nouvelles sépultures, en nombre croissant au cours des dernières décennies, notamment en liaison avec les opérations d’archéologie préventive, en France et ailleurs en Europe, de même que l’utilisation plus fréquente des datations radiocarbones qui ont permis de situer dans le Mésolithique un nombre certain de tombes qui n’auraient pu être caractérisées auparavant, devrait concourir à moyen terme à compléter ce tableau des rites funéraires au Mésolithique. Par ailleurs, la généralisation de l’utilisation des méthodes de l’anthropologie « de terrain », par exemple en Scandinavie, devrait également contribuer à une meilleure connaissance de ces pratiques, de leurs similitudes, mais aussi de leurs particularités, au niveau européen.

 

Eléments bibliographiques :

NB : certains ouvrages ou articles ci-dessous contiennent des bibliographies détaillées auxquelles le lecteur pourra se reporter.
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