1795 «L'Affaire de Quiberon Forces Royalistes voir en annexe
1795. Les émigrés débarquent pour restaurer la royauté Dans le Morbihan, 12.000 Chouans guettent les voiles anglaises. Le 17 juin 1795 déjà, une division attaque par surprise une poudrerie républicaine, s'empare de la poudre, et la transforme, en famille, sous la forme de cartouches. Reste à attendre les armes anglaises. Débarquement réussi
Samedi 27 juin une escadre de Trois vaisseaux de ligne de 74 canons, deux frégates de 44, quatre bâtiments de 30 à 36, plusieurs chaloupes canonnières et 60 bâtiments de transport ont fait voile vers les côtes de France. L'expédition était d'importance : 80 000 fusils, 80 canons, des munitions, de la poudre, des uniformes, des souliers pour 60 000 hommes, des biscuits, de la viande salée, du brandy et des réserves de faux assignats. La division était forte de 4 000 hommes, comprenant, avec les 3.600 émigrés répartis en 5 régiments, 20848 prisonniers de guerre français qu'on avait enrégimentés en leur promettant la liberté. Les troupes sont débarquées sur les plages de Carnac et viennent rejoindre les Chouans de Bretagne. Leur objectif commun : restaurer la monarchie en France : "Pour les Emigrés en 1795, chasser du pouvoir les assassins de Louis XVI, les géôliers de Louis XVII, rétablir la monarchie et plus encore la religion persécutée, c'est faire oeuvre de croisés". "On ne peut comprendre le drame de Quiberon si l'on oublie ce point de vue" écrit Madame Claude Dervenn dans "Quiberon Presqu'île"  Attaque de Quiberon par les troupes républicaines - d'après Swebach et Desfontaines
 < Le comte de Provence - gravure de Bonneville Pour faciliter leur arrivée, les Chouans dispersent l'armée républicaine à terre. Ils conquièrent d'abord le bourg de Carnac, puis progressent rapidement dans les terres. En quelques jours, les royalistes se rendent maîtres de Sante-Barbe, Auray, Mendon et Landévant. Si l'avancée est incontestable, l'obéissance hiérarchique l'est moins. Le lendemain du débarquement, apparaissent déjà les premières divergences au sein des autorités de commandement. Sous les traits des comtes d'Hervilly et de Puisaye s'affrontent les deux frères de Louis XVI : le comte de provence futur Louis XVIII et le comte d'Artois futur Charles X (voir en annexe) Si d'Hervilly dépend de l'autorité anglaise, (il s'affirme "Général en chef de l'expédition"), Puisaye tient la sienne de la France (il se dit "Commandant en chef des troupes de débarquement"). Ainsi la distribution des armes amenées par les Anglais aux Chouans pose problème, tout comme la stratégie à adopter. Le 28 juin, les Blancs assistent à deux offices religieux, l'un sur la plage de Légénèse avec Puisaye, l'autre dans le bourg de Carnac avec d'Hervilly. O combien symbolique, ce conflit interne s'amplifie de jour en jour, à l'avantage des républicains. IL y aura bientôt des atermoiements, des ordres, des contre-ordres, un mépris total des Chouans de la part du Comte d'Hervilly. D'ailleurs le 30 juin, ce dernier refusant de lancer ses troupes régulières en avant, décide d'évacuer Carnac et toute la ligne déjà conquise, pour concentrer ses troupes dans la Presqu'île de Quiberon. Réaction républicaine Dès le 27 juin, le général Hoche fait l'inventaire des troupes à Vannes : 2.000 hommes seulement sont à sa disposition. Après de vaines sorties, Hoche reprend Auray et Landévant. Sa progression géographique va de pair avec la croissance de ses effectifs. Dès le 4 juillet, son armée compte 13.000 hommes. Tableau de Hannequin sur l'affaire de Quiberon De leurs côtés, les Blancs progressent vers Quiberon.....
Le 3 juillet, ils s'emparent du Fort des sans-culottes, qu'ils rebaptisent aussitôt Fort Penthièvre. La garnison se rend mais 400 hommes se déclarent volontaires pour être enrôlés dans le régiment d'Hervilly. Le reste est embarqué, conduit à bord de l'escadre anglaise et expédié en Angleterre, fers aux pieds, à fond de cale. Mais derrière eux, les Républicains regagnent du terrain. Pendant des heures, les Chouans vont résister pied-à-pied à un ennemi supérieur en nombre et en armement, commandé par le Général Lazare Hoche, Général en chef de l'armée républicaine de l'ouest, afin de permettre aux troupes des Emigrés et aux 10000 à 15000 paysans de la région de trouver dans la Presqu'île un refuge illusoire. Repoussés malgré eux, les royalistes se replient dans la presqu' île de Quiberon. C'est la panique populaire : des milliers de femmes et d'enfants qui ont cru en la victoire des Blancs suivent les «débarqués». Il faut le courage de quelques chefs chouans pour sauver ces populations de l'avancée des Bleus. L'inaction des Emigrés, sous le commandement de d'Hervilly, provoque la colère de Cadoudal. «Les monstres auraient dû être engloutis dans la mer avant d'être arrivés à Quiberon», lance le chef chouan. Le 6 juillet, Hoche reprend Carnac. Il écrit à la convention: "Les Anglo-Emigrés-Chouans sont bloqués comme des rats dans une ratière". Le 7 juillet, les troupes des Emigrés et les Chouans sont piégés sur la presqu' île. 
Du soutien venu des eaux C'est Georges Cadoudal qui redonne espoir aux Royalistes. Dans la nuit du 10 au 11 juillet, 3.500 Chouans, encadrés par leurs chefs, embarquent pour Sarzeau sur ordre de d'Hervilly avec l'objectif de gagner les Côtes du Nord pour y constituer une autre armée «blanche» qui surprendrait Hoche sur ses arrières. Quiberon ne les reverra jamais. 
Le Chevalier de Tinteniac, intrépide chef Chouan, ne sait pas qu'il n'a plus que quelques jours à vivre. Sa mission: remonter à travers tout le pays, entraîner avec lui tous les insurgés, redescendre avec cette armée pour surprendre à revers le camp de Hoche à l'instant même où les Emigrés l'attaqueront en force dans la nuit du 15 au 16 juillet. Le 15 au soir, une seconde division de plus de 2000 hommes commandée par Charles de Sombreuil(voir en annexe) arrivant d'Angleterre, s'ancre dans la Baie près de l'escadre. Devant Puissaye et d'Hervilly, Charles de Sombreuil insiste pour retarder d'un jour l'attaque prévue afin que ses 2000 hommes, bien entraînés, puissent participer à l'attaque. Ils refusent, hostiles, semble-t-il, à ce jeune chef. Après un affrontement mortel pour beaucoup d'Emigrés, ceux-ci sont contraints de battre en retraite. D'Hervilly a été frappé en pleine poitrine par un biscaïen. Les pertes des Républicains n'étaient pas négligeables, mais celles des Emigrés sont plus importantes encore: 1500 morts, les canons abandonnés près de leurs chevaux abattus. Les Chouans multiplient alors les tentatives de sortie du fort Penthièvre qu'ils occupent depuis le .le 15 Thermidor an III, mais en vain. Fort Penthièvre au 18ème siècle(ouvrage Charron 1926) >>
4000 hommes défendent le fort. La garde du "Fort sans Culotte" avait été confié aux 400 hommes, transfuges de l'armée républicaine. Ils désertent en grand nombre ainsi que les soldats républicains recrutés en Angleterre sur les sinistres pontons anglais. A Vannes, Hoche se fait envoyer tous les déserteurs pour les interroger et dresser ses plans. Il donne des ordres très précis : Reprendre le Fort "sans culotte" et égorger tout ce qui se trouvera dans le fort. Les trois colonnes républicaines sont prêtes à attaquer le fort. Ne manque plus que le mot de passe utilisé par l'ennemi pour lancer l'assaut. La nuit du 20 juillet, un déserteur fournit le code à Hoche. Le général donne le départ Un orage brutal éclate sur la Presqu'île dans la nuit du 20 juillet. C'est ce qu'attendait Hoche pour attaquer. Avec d'énormes difficultés dues à l'orage, les colonnes d'assaut prennent le Fort par surprise car l'orage et le bruit des vagues couvrent les pas des 3.000 hommes qui attaquent le Fort par le centre, la gauche et la falaise. Les navires anglais ont beau tirer, la riposte royaliste ne stoppe pas l'entrée des républicains dans le fort. Les soldats royalistes sont massacrés sans pitié : à deux heures du matin, l'adjudant Général MESNAGE est maître de la place et, selon l'ordre de Hoche, il a "fait égorger tout ce qu'il a trouvé". 
| Le pont levis du camp retranché est ouvert, le drapeau tricolore flotte sur les hauts du Fort. A cette heure, la seule force royaliste encore intacte est la division de Charles de Sombreuil. Autour, les villages de la presqu' île sont totale. Puisaye, enfin réveillé, à jugé la situation Sa réaction est immédiate: il n'y a plus qu'a se rembarquer. Il bat le rappel des troupes vers les chaloupes anglaises. Galopant vers le Sud, il rencontre Sombreuil qui a rassemblé ses troupes.Il lui donne l'ordre de rebrousser chemin et d'aller occuper le moulin de St-Pierre qui domine la Presqu'île. Lui-même prend le prétexte de mettre des documents à l'abri pour s'enfuir par la mer dans la chaloupe qui l'attendait...
< Chouan Emigrant > |  |
A Port d'Orange, l'embarquement s'est organisé, comme à Port Haliguen. Il y aura des scènes atroces et des dévouements admirables. Charles de Sombreuil avait pu tenir un peu de temps autour du moulin de St-Pierre, mais il lui faut reculer, reculer jusqu'à Porigo près de Port Haliguen. .Blessé le 16 juillet, d'Hervilly est évacué sur un bateau anglais. A Quiberon, le comte de Sombreuil tente de résister aux Républicains. Femmes et vieillards se jettent à l'eau pour tenter de rejoindre une chaloupe, des Chouans se suicident, d'autres se noient. Tout va se dérouler maintenant devant cette grève jonchée de 700 cadavres. Un émissaire de Hoche, Rouget de L'Isle, apporte les paroles du Général "se rendre à discrétion". Il revient vers Hoche "Ils vont se rendre". "Oui, répondra celui-ci, voilà ma tâche remplie. Celle des représentants commence. Qu'ils viennent partager cette affreuse responsabilité". Quand Rouget de l'Isle, ramenant Tallien et Blad, débouche sur la dune, il voit Hoche près de Sombreuil, ils marchent côte-à-côte, paisiblement. Nul ne saura jamais ce que se sont dit les deux chefs. En revenant à Porigo, Sombreuil déclare: "J'ai obtenu des Généraux républicains une capitulation qui vous garantit à tous la vie sauve", mais il taisait la terrible exception qui le concernait. Hoche avait exigé que cesse le feu des frégates anglaises, les signaux n'ont pas été compris. Un jeune lieutenant de vaisseau, Gesril du Papeu(voir en annexe), ami de Chateaubriand, ote sa veste, se jette dans les vagues et nage jusqu'à la corvette la plus proche. Il transmet l'avis de capitulation et l'ordre de cesser le feu (le navires anglais cannonaient la plage). Mais, comme il a donné sa parole, il revient à la nage pour se constituer prisonnier. Le 21 juillet, la reddition de Sombreuil sonne le glas de l'Affaire de Quiberon. Hoche forme des colonnes de prisonniers, Sombreuil en tête. L'ordre est donné à la longue file des prisonniers, un peu plus de 3000 hommes, Emigrés et Chouans de quitter Port Haliguen. Ils iront à pied par de mauvais chemins. Le cortège marche sans surveillance vers Auray, où les captifs sont entassés dans les églises. 748 fusillés La répression de l'armée est implacable. Alors que les conventionnels de Paris tardent à prendre une décision, le directoire départemental demande l'exécution des principaux chefs royalistes à Vannes. Près de 20 commissions militaires vont siéger pour juger ceux qui ont «servi contre la France». Sur les 6.262 personnes arrêtées, femmes et enfants sont rapidement relâchées. Le 27 juillet, les 16 premiers condamnés à mort sont fusillés à Vannes, dont Sombreuil, l'Evêque de Dol, Monseigneur de Hercé, 11 prêtres et 3 nobles.
<Prison de Vannes (Ouvrage Charron 1826) Les exécutions se succèdent à Quiberon, Vannes, Auray et Port-Louis. Au total, 4.245 personnes passent devant les commissions. 74% d'entre elles seront acquittées, et parfois incorporées dans l'armée ou libérées contre des amendes en grains. 6% feront de la détention. Sur le nombre d'exécutés (17%), les Emigrés, les nobles et les prêtres ont été les plus touchés.
Reddition ou capitulation, la question reste posée. La parole que Hoche aurait donnée à Sombreuil de laisser aux émigrés la vie sauve expliquerait pourtant que les prisonniers ne se soient pas échappés lors de leur transport «peu surveillé» vers Auray. Quelques mois après l'Affaire de Quiberon, en octobre 1795, la Convention fait place à un nouveau régime, le Directoire. Mais l'insurrection existe toujours dans l'Ouest. Dès le mois d'août 1795, Cadoudal réorganise l'armée des Chouans et poursuit ses actions en Bretagne. Les traces du débarquement et de la répression  photoBéatrice Versraete © | Cet épisode, qui démarrait sous les meilleurs auspices pour les royalistes, a tourné au drame. Carnac, Auray, Vannes et Quiberon ont gardé des stigmates du débarquement et de la terrible répression qui s'ensuivit. Des stèles et croix rappellent sur les plages de Carnac et de Quiberon le débarquement des Emigrés Le fort Penthièvre existe bien entendu toujours. |
Dès 1795, les lieux d'exécution des émigrés et des Chouans sont appelés «champs des martyrs». 206 royalistes sont exécutés dans les marais de Kerzo, actuel Champ des Martyrs à Brech. Sur place, les corps sont à peine ensevelis, si bien que les ossements remontent rapidement à la surface. Grâce à une souscription, la construction d'une chapelle à la Chartreuse d'Auray est entamée dès 1823 en mémoire des victimes royalistes de Quiberon. 
Médaille frappée lors de l'inauguration du monument de la Chartreuse d'Auray, le 15 octobre 1829. Bronze ou Etain 50mn. Il se trouve dans la Chartreuse un caveau ou les restes d'une partie des victimes des fusillades reposent. |  SCAPULAIRE DE QUIBERON > JUIN et JUILLET 1795. |
LES RESCAPES ROYALISTES Les rescapés, récupérés en catastrophe par les vaisseaux Anglais de l'amiral Warren, sont débarqués sur l'île d'Houat, puis rejoignent l'île d'Yeu ou prennent pied, le 30 septembre, le comte d' Artois, accompagné des hussards de Warren et de Choiseul, des uhlans britanniques et de 5 000 soldats Anglais. Hoche veiIle et seules armes et munitions parviennent à Charette. Un mois plus tard, le "corps expéditionnaire" se replie définitivement en Grande-Bretagne. Les survivants de Béon (37), Damas (14), Périgord (16), Rohan (83) et Salm (18) sont incorporés au Loyal-émigrant (97 hommes). En novembre, l'unité compte 310 présents et 347 en décembre, mais seulement 70 nobles. Le régiment d'Hervilly (207) est licencié le 24 décembre 1795 (D'Hervilly est mort le 4 novembre). Du Dresnay (43) et Hector (80) suivent le même chemin, beaucoup d'hommes rejoignent les régiments de Castries et Mortemart. Les hussards de Warren (40) sont licenciés le 24 janvier suivant. Rotalier et ses 440 survivants sera réorganisé en 1796. Source : http://hometown.aol.com/lycornelia parmi ces survivants : Archambaud de Talleyrand, Boson de Talleyrand, Bruno-Gabriel-Paul, marquis de Boisgelin, l'épouse de Timoléon de Bennes qui....vêtue en homme survivra également au débarquement de Quiberon en parvenant à fuir déguisée… en femme ! |
Nous remercions Béatrice Verstraete dont ce texte a presque intégralement repris une page qu'elle a écrite pour les histoires de Bretagne du Journal le Télégramme ainsi que www.bibliorare.com et Source : http://hometown.aol.com/lycornelia pour certains textes et documents
Pour en savoir plus : Bertrand Frélaut Quiberon, la répression du débarquement , Ouest Èditions, 1993. Roger Dupuy De la révolution à la chouannerie , Flammarion, 1988. Acte du colloque d'Auray (13/14 septembre 1995) Bicentenaire du débarquement des émigrés à Carnac et de l'affaire de Quiberon, par l'association Mémoire d'hier et d'aujourd'hui (02.97.56.36.83) Chevalier BERTHIER DE GRANDRY Récit sommaire de la déplorable affaire de Quiberon. Nantes, Imprimerie de Vincent Forest, 1861 Récit inédit de l'expédition de Quiberon. Le chevalier Berthier de Grandry le rédigea en 1816 à l'intention de ses deux fils. Il n'avait que 14 ans lorsqu'il participa aux événements. C'est avec les débris, selon ses propres termes, du régiment de Loyal-Émigrant qu'il fut pris à Quiberon le 21 juillet 1795. Il raconte avec sincérité et sans partie pris tous les épisodes de ce débarquement hasardeux qui laissa peu de survivants dans les rangs royalistes. La seconde partie du récit porte sur son arrestation, son incarcération et son jugement. Condamné à mort malgré son jeune age. Il fut sauvé par l'intervention mystérieuse d'un militaire. On trouve en appendice le récit des efforts de madame de Talhouët pour sauver son frère.
Duchesse de SAULX-TAVANES Sur les routes de l'émigration. Mémoires (1791-1806) publiés avec une introduction et des notes par le Marquis de Valous. Paris, Calmann-Lévy, 1934 "Partie de France en 1791, la duchesse de Saulx-Tavannes raconte ses séjours en Belgique, Hollande et Angleterre, la façon dont y est perçue l'affaire de Quiberon. Elle émigre ensuite en Russie d'où elle ne reviendra qu'en 1806" (Fierro, 1322) ; "Le chapitre VIII concerne le retour des émigrés et les renouveau des salons. Ayant récupéré une partie de leurs terres, le duc et la duchesse de Saulx-Tavannes se retirent en Bourgogne. On retiendra l'épisode du métayer qui a soustrait aux vendeurs révolutionnaires quatre journaux de terre (p. 174)." Tableau de Outin
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